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Saturday, March 12, 2011

A Kobe, rien n'est touché,
si on n'allume pas la télé, la vie pourrait ressembler à celle qu'elle était vendredi 11 mars 2011 avant 15h00.
Même à cette heure précise, nous étions, Anzu et moi, assises autour de la table basse, à faire un puzzle.
Le seul bruit, la seule vibration furent ceux de mon téléphone portable sur le tapis,
Hiro qui écrit: じしん だいじょうぶ
(tremblement de terre ça va?)
On n'avait rien senti.
Quel immeuble vieux mais solide, ce shataku...

On continue le puzzle.
Et puis, préparer le repas, prendre la douche, le téléphone a sonné, longtemps, il ne s'arrêtait jamais.
Ma soeur était affolée, et en lui parlant j'ai commencé à voir des images irréelles par internet.

Cela me faisait bizarre. Tsunami gigantesque, tremblement de terre 8.9, des secousses, des feux, des coupures de tout, électricité, gaz, téléphone, mais pourquoi on n'a rien senti nous???

Hiro regarde la télé, le compte des corps qu'on retrouve, les alertes qui clignotent, beaucoup de rouge sur la côte, des listes entières de noms de villages qu'on évacue, des rapports d'experts, des schémas de réacteurs nucléaires, des chiffres, des listes, des gens qui prennent le micro, des instructions, safety,
on allume la télé mais on éteint la lumière.
Des bougies pour consommer moins, parce qu'on suit les instructions, parce qu'on sait même pas quoi faire d'autre.
Il faut éteindre la télé. Ca consomme trop d'électricité.
Et ça rend fou, les gens qui cherchent leur famille, leur maison, les trains qui tombent dans l'eau, les avalanches.

Les tsunamis sont féroces, ils ne sont pas seulement là pour ensevelir et détruire, ils arrachent aussi et déplacent, ils étouffent, assomment, noient, perdent les corps, et puis ils en laissent qui meurent de froid, qui n'ont rien à manger, pas de lumière, pas de chaleur, dans des zones encore en hiver, avec la neige...

Friday, March 04, 2011

AlaGwen(n)

Dimanche matin, quand nous nous sommes réveillées (Anzu et moi, les dormeuses), Hiro (le lève tôt) avait déjà préparé son petit déjeuner.
Il a pris une photo de ce moment, qu'il a appelé "A la Gwen".


Je vois ce qu'il veut dire, j'ai senti moi aussi en regardant la photo, qu'il y avait quelque chose de très "Ala...".
Il prend en photo un moment heureux et calme, il arrange les objets pour la photo. Le pain est au levain, fait maison, et pas trop raté, la confiture aussi, maison, celle qu'il préfère, pomme raisin cannelle, et le beurre, sans sel, comme en France.

Ce qui n'est pas AlaGwen m'apparaît aussi, en deuxième regard, le futon derrière, le faux pli sur la nappe, la cuillère dont on ne voit que la partie arrondie, le paquet de beurre sur la table, à l'envers.
La position de la tasse de café...
C'est AlaGwen d'Hiro.